Tarmac de la Villette
"L'AFFICHE" de Philippe Ducros
mise en scène Guy Delamotte
L’Affiche décrit la violence insupportable d’un impossible quotidien sous occupation. La parole est donnée à ceux qu’on n’entend jamais, aux gens simples qui en subissent les impacts, des deux côtés du mur. En Palestine, lorsque quelqu’un meurt d’une cause reliée directement à l’occupation, des factions s’approprient sa mort, font une affiche avec la photo du martyr et en tapissent les murs du pays. Les murs en sont complètement recouverts... La martyrisation est une arme de guerre extrêmement présente dans les deux camps.
Abou Salem est imprimeur de ces affiches. Un jour, il se retrouve à imprimer l’affiche de martyr de son seul fils. Salem est mort par balle, lors d’un affrontement avec les soldats qui hantent son camp de réfugié. On suit les destins des deux côtés de la balle. Oum Salem, la mère du martyr ne voit rien d’autre que la haine, elle souffre jusqu’à la destruction. La famille se dégrade, la colère ne laisse plus de place à l’humanité. De son côté, Itzhak, le soldat responsable de la mort de Salem, se retrouve submergé par la violence de son geste et par l’impitoyable cruauté de l’occupation.
En marge, Shahida, la sœur de Salem, essaiera tant bien que mal, de rêver avec son amoureux Ismaïl, et ce malgré les check points, malgré l’incarcération administrative, la résistance, le soleil et le ciment. Malgré la soif et la Mer Morte qui baisse d’un mètre par année.
Puis l’histoire explose. Elle se désorganise comme la vie là-bas. Elle remonte le fleuve de la douleur jusqu’à la haine et le fanatisme, elle cède la place à la peur et aux exploiteurs de désespoir pour enfin accoter les survivants, le dos au Mur de séparation. 8 mètres de haut, le mur.
2 > 6 mars et du 12 >14 mars 2009 / Panta Théâtre - Caen
10 mars 2009 / Théâtre de Coutances
26 >29 mars 2009 / Théâtre des 2 Rives - Rouen
6 > 31 octobre 2009 / Le Tarmac de la Villette - Paris
16
> 18 novembre 2009 / Panta Théâtre - Caen / 20 > 23 novembre 2010
24 novembre 2009 / Théâtre / L'Espal - Mans / 25 > 23 novembre 2010 CDN Dijon
LA TERRASSE - Critique le 27/03/09
L’Affiche
Poursuivant son travail sur les écritures contemporaines, le Panta Théâtre présente L’Affiche, pièce du jeune auteur québécois Philippe Ducros. Un spectacle qui, entre Israël et Palestine, traverse les déchirements d’êtres humains happés par la mort et la violence.
« Ce n’est pas la guerre, Sarah, c’est l’occupation, explique Itzhak à son épouse. On ne peut pas s’attendre à ce qu’ils ne fassent rien. (…) Un jour, on va devoir vivre avec eux. » « Ils », « eux », ce sont les Palestiniens, hommes et femmes que ce jeune israélien en cours de service militaire a de plus en plus de mal à combattre. Car, il a tué Salem et cette mort agit en lui comme une déflagration. Une déflagration qui, bien sûr, retentit également du côté de la famille du disparu. Le père de ce dernier, imprimeur, va lui-même confectionner les affiches représentant le visage de ce fils tombé en martyr de la cause palestinienne. Les portraits ainsi imprimés iront tapisser les murs d’une terre qui, à l’image de ce foyer amputé, ne cesse de s’enfoncer dans la souffrance et la colère. Le conflit israélo-palestinien est un sujet dont assez peu d’auteurs dramatiques occidentaux se sont emparés. Un sujet périlleux, éminemment sensible, qui peut entraîner bien des dérives et bien des schématismes. Ces pièges, le jeune auteur québécois Philippe Ducros a su les éviter en plongeant dans la profondeur et la vérité de l’humain, en choisissant de composer une fresque de l’ordinaire, de la quotidienneté, plutôt qu’une pièce à thèse.
Une terre à partager
Cette fresque — segmentée en vingt-cinq « affiches » — tisse un maillage extrêmement dense de lieux et de situations, de révoltes, d’engagements, de rêves et de renoncements. Comme autant de parenthèses ouvrant sur des trajectoires personnelles hautement complexes, L’Affiche pose les jalons de réalités qui échappent aux réductions manichéennes. Car, ce sont des êtres et non simplement de beaux concepts qui se situent au centre de ce projet théâtral. Des êtres déchirés, torturés par leurs blessures intimes, que Guy Delamotte a eu la bonne idée de placer dans un univers totalement déréalisé. En effet, la scénographie conçue par Jean Haas ne se réfère en rien aux multiples points géographiques définis par le texte. Elle trace le cadre d’une salle de réunion dans laquelle paraissent devoir se tenir des négociations de paix entre Américains, Palestiniens, Israéliens et Européens. En s’écartant de manière radicale d’un réalisme illustratif, le metteur en scène construit une représentation aux effets parfois volontaristes, mais qui démontre une belle hauteur de vue. Une représentation pleine d’exigence qui offre la possibilité de réflexions dégagées de toutes perspectives sentimentales ou misérabilistes.
Manuel Piolat Soleymat
Mise en scène : Guy Delamotte
Scénographie : Jean Haas ; Costumes : Cidalia Da Costa ; Lumières : Fabrice Fontal ; Musique : Denis Gambiez
Vidéo : Laurent Rojol ; Régie générale : Frédéric Bertuglia
Avec : Patrick Azam, Murielle Colvez, Véro Dahuron, Christine Guênon, Michel Quidu, Alex Selmane, Timo Torikka
Patrick Azam
Christine Guênon
Michel Quidu
Patrick Azam
Michel Quidu
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